L'éducation au centre du débat ?
J'ai suivi avec une attention particulière le "débat" (qui n'en a que le nom) qui a eu lieu hier soir entre les deux candidats du deuxième tour à l'élection présidentielle de dimanche et qui a failli tourner par moment au pugilat. Autant dire que se trouvait sur le plateau (ou plutôt dans la cour de récréation) le futur (et/ou ex-) Président de la République Française. J'ai écouté encore plus attentivement leurs propositions concernant l'éducation, bien évidemment, en qualité moi-même d'ex (et/ou futur) enseignant. Alors qu'en ressort-il ?
Passé
Et bien pas grand chose au final. Les deux prétendants se sont renvoyés, dos à dos, leurs contradictions et leur incapacité chronique à remettre le navire sur le bon cap, vers des courants plus stables et porteurs. Le premier, le président sortant, sort justement péniblement de cinq ans d'échecs en la matière : Il a supprimé des dizaines de milliers de postes d'enseignants, éradiqué purement et simplement leur formation (sic) ainsi que les RASED (réseaux d'aides aux élèves les plus en difficulté), et, pour finir, en a terminé avec l'accueil des enfants de deux ans à la maternelle qui faisait pourtant notre fierté et aussi notre force. Autant dire qu'il n'a pas vraiment oeuvré, il faut bien l'admettre, pour arranger une situation déjà largement compromise, déficit du budget oblige. Evidemment, il est plus important de retenir les grandes fortunes que d'éduquer et d'instruire convenablement ceux qui sont le futur de la Nation. Il propose, donc, sous-entendu, à ces feignasses d'enseignants qui ne "sont présents à leur poste que dix-huit heures par semaine pendant huit mois" et qui sont bien sûr la cause de tout, de travailler (enfin) dorénavant cinquante pour cent de temps en plus dans leurs établissements respectifs pour un accroissement de leur salaire de vingt-cinq pour cent. Quelle générosité ! (on oubliera évidemment la préparation de la classe, les corrections, les évaluations, la fatigue psychique, le pilotage de projets, les obligations administratives, la communication avec les familles, les vacances d'été qui ne sont et n'ont jamais été payées -et oui- etc, etc). Qui acceptera une telle plaisanterie, d'autant que ce sera sur la base du volontariat, évidemment ?
Présent
De l'autre côté, à la gauche de la droite (au centre ?), celui qui semble bien parti (?) pour être le chef de l'état pendant les cinq prochaines années, et bien, que propose-t-il ? Une augmentation des postes, douze mille par ans pendant cinq ans, si j'ai bien compris. Soit... Quid de la formation, des modalités de recrutement, de la qualité de l'enseignement, du mal-être des enseignants, de la pénibilité du travail, du rapport de plus en plus compliqué avec les familles, les élèves, la hierarchie, de ceux qui comme moi, et ils sont de plus en plus nombreux quittent ou ont dans l'idée de quitter le navire vers d'autres horizons qu'ils espèrent plus cléménts ? Osera-t-il affronter la situation, admettre l'échec évident et grave auquel son parti a lui-même participé lors de ses années de pouvoir ? Sera-t-il celui qui osera enfin regarder les choses en face en se donnant les moyens, et pas seulement quantitatifs, qui permettront un redressement de cette institution, pilier de la République et qui a pendant si longtemps été la fierté de la France ? Je n'en suis pas sûr même si je ne peux que louer (du bout des lèvres) son intention de faire de l'éducation une des priorités de son mandat. Ces paroles, déjà peu enthousiasmantes ne resteront-elles que des promesses ou deviendront-elles des actes ? Sera-t-il celui qui, enfin, décidera de balancer un grand coup de pied dans la fourmilière afin de mettre les cartes sur la table pour la grande redistribution accompagnée de la profonde remise en question qui s'imposent ? En aura-t-il le courage ? Permettez-moi d'en douter.
Passé composé
Bien sûr, la critique est plus facile que la construction et je n'ai pas la prétention d'avoir ne serait-ce que les prémices d'une solution à cet inextricable problème qui s'apparente lui aussi à une véritable quadrature du cercle. Surtout au regard de la situation économique et sociale du pays, du continent, du monde. En faisant fi du fait qu'il y a d'autres problèmes qui ont eux aussi leur urgence, ne serait-il pourtant pas temps d'admettre que l'éducation, au même titre que la santé, est ultra-prioritaire, que le public a changé, que les rythmes scolaires sont inadaptés à ce dernier et aux exigences de la société moderne ? Et que dire du recrutement farfelu des enseignants, de leur formation, de leur suivi en cours de carrière, en décalage total avec la réalité des classes, des élèves d'aujourd'hui... Je n'ose même pas parler des programmes absurdes et incohérents pondus le plus souvent par des bureaucrates peu compétents en matière d'éducation et coupés de la réalité du terrain, à l'abri de cette organisation horizontale et à sens unique, inepte, et dont le seul objectif est souvent de graver leur passage dans le marbre en rejetant en bloc le travail de leurs prédécesseurs, quitte à mettre dans une situation intenable ceux qui sont les rouages de la machine et qui doivent faire le tampon entre les étages ?
Futur antérieur
Personne, enseignants comme "usagers" ne pourra dire le contraire : l'école Française va mal, très mal. La situation devient de plus en plus critique et il ne ressort de tout ça pas grand chose de bon. Les différents responsables politiques qui se sont succédés n'ont pu que démontrer leur incapacité chronique à régler le problème. Le plus triste dans tout cela, c'est que je n'ai pas franchement l'impression que les choses veuillent bien s'arranger (elles ne le feront pas toutes seules en tout cas...). Pire, même, il y a de grandes chances que, à plus ou moins long terme, la situation s'aggrave.
Imparfait du subjonctif et conditionnel
Je ne peux donc que souhaiter bonne chance, et surtout bon courage au futur président de la République et, par extension, à son ministre de l'éducation... Le Mammouth devient incontrôlé, et surtout, incontrôlable !
Et enfin... Futur "simple"
A quoi ressemblera la génération de demain ? Sera-t-elle ce monstre illétré, inculte, violent, sans foi ni loi qui se profile ? La question reste ouverte...
Mise à jour du 7 mai 2012.
Après réflexion, je renvoie cet article dans la partie Actus étant donné qu'il ne parle pas de "ma" reconversion, et encore moins de reconversion en général. Il a été publié sur Agoravox.
Ca y est, le candidat socialiste est le nouveau président de la République. J'ose croire, sans énormément d'espoir que lui et ses futurs associés se donneront les moyens et seront en mesure de redresser l'Ecole Publique Française (j'insiste sur "Publique").
Première déception (d'une longue série ?) : il semblerait (précisions de Bastien, du Snuipp43) que, et à propos des 60.000 postes promis par le candidat élu "12 à 13000 iraient au privé, alors même qu'ils sont ponctionnés sur les autres ministères et que l'enseignement privé n'a perdu que 5000 postes ces 5 dernières années." A peine le combat terminé, un autre commence...
Il sera toutefois difficile de faire pire en matière d'éducation que lors de ces cinq, voire dix (quinze, vingt, trente ?) dernières années...
Inscrivez-vous au blog
Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour
Rejoignez les 22 autres membres