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  Une semaine après Cancer 4 Cure, album solo du producteur New-Yorkais El-P (chronique ici), sortait ce R.A.P. Music de Killer Mike, rappeur poids moyen d'Atlanta connu uniquement des puristes et à la notoriété toute relative, noyée dans la masse impressionnante de MCs que compte le vivier non moins impressionnant de la métropole Géorgienne. Que pouvait-on espérer de cette collaboration contre-nature dont tout laissait penser qu'elle allait accoucher d'un disque qui risquait au mieux de tomber rapidement dans l'oubli, et au pire de se faire descendre en flèche par les critiques blasés ? Pas grand chose ? Et bien, détrompez-vous...

  Killer Mike, malgré un pseudo pas très inspiré, est une figure reconnue du rap sudiste. Elevé auprès du géant Outkast et de sa bande d'ATliens, duquel il est aujourd'hui émancipé, l'ami Mike a construit sa carrière laborieusement, malgré quelques succès et featurings de qualité. J'avoue moi-même n'avoir que vaguement entendu parler de lui, notamment lors de sa désormais lointaine apparition sur le magistral Stankonia d'Outkast (en 2000). Depuis, il a tenté de se construire une réputation à la force de ses mains. Une réputation encore un peu limitée à quelques poignées d'initiés. Une situation qui risque de changer avec ce R.A.P. Music (pour Rebellious African People).

  L'annonce de sa collaboration avec El-P a laissé tout le monde dubitatif (enfin, tout le monde, c'est vite dit...). En effet, le son d'Atlanta est assez particulier, et bien différent de ce qui se fait à NYC. Qu'importe, les deux bonhommes ont bossé dans leur coin et voilà qu'en ce mois de mai (ben ouais, je suis en retard...) sort le disque, dans une indifférence quasi-générale. Une indifférence qui n'allait pas durer. A l'heure ou j'écris ces lignes, c'est un des plus gros succès hip-hop (critique pour le moins) de ce début d'année 2012. Et effectivement, sans être parfaite, la galette fait son effet. D'entrée de jeu, Big Beast donne le ton. Et quel ton ! C'est une véritable tuerie. El-P, tout en apportant sa touche personnelle, s'est adapté magistralement aux exigences du son si particulier de ce southern hip-hop. Un son monstrueux, du début à la fin, et encore meilleur que dans Cancer 4 Cure... C'est pour dire. Comment résister en effet aux brulots que sont entre autres Big Beast, donc, Butane, Don't Die, Anywhere But Here, Willie Burke Sherwood, Untiteld, Southern Fried... Mention très très spéciale pour Reagan, mon morceau préféré de l'album, au propos politique documenté et ultra-tranchant, évoquant les conséquences actuelles de la politique extérieure de l'époque mise en place par l'ancien acteur Ronald (trafic de drogue, armement, terrorisme...). Bluffant ! Le son monte tout en douceur, le flow est acéré, mettant en forme un texte subversif comme je les aime, dont voici les deux derniers vers : I leave you with four words : I'm glad Reagan's dead, Ronald Wilson Reagan, 666.

  Bien sûr, on pourra reprocher un manque d'originalité, des redondances dans les thèmes, un flow parfois un peu lourd et très (trop) proche de celui de Big Boï d'Outkast... On pourra ! N'empêche qu'on passe quand même un bon moment, en grande partie grâce à un son très, mais alors très très bon. Et même si les références religieuses pourrissent parfois le propos (n'oublions quand même pas que nous sommes en Amérique), elles sont la plupart du temps utilisées à bon escient, comme dans le morceau éponyme : I've never really had a religious experience, in a religious place. Closest I've ever come to seeing or feeling God is listening to rap music. Rap music is my religion. Amen. En un mot, sa religion, c'est le hip-hop.

 Killer Mike, après plus de dix ans de carrière signe sans doute avec R.A.P. Music son meilleur disque. Un disque honnête, Old-School, inspiré et intelligent. Que demander de plus ? A la vue de l'état actuel du hip-hop (notamment en France), on va quand même pas cracher dans la soupe, si ?

  Note : 3.5/5   

Le clip de Big Beast

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