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La tablette numérique, future ardoise de l'élève ?

 

 

 

 

  En cette fin d'année scolaire, et avant que nos chers bambins ne partent en vacances pour deux longs mois, permettez-moi de revenir sur une des innovations (contrastée) de l'année, à savoir l'introduction des tablettes numériques dans certaines classes et certains établissements, pour ce qui ne fut cette année qu'une expérimentation. Oui, mais jusqu'à quand ? La question est donc : les tablettes numériques peuvent-elles, et vont-elles remplacer cette vieille et obsolète ardoise noire sur laquelle les élèves planchent toujours ?

 

  Depuis l'apparition de l'ordinateur dans les années quatre-vingts, une révolution s'est enclenchée : celle du numérique. D'abord réticents, les professionnels de l'éducation ont du se rendre à l'évidence quand au pouvoir didactique et aux possibilités pédagogiques de ces machines de silicium. Alors bien sûr, les ordinateurs n'ont toujours pas remplacé les cahiers, ni les stylos, ni les livres, et j'espère qu'ils ne le feront jamais, mais ils s'avèrent être aujourd'hui des outils indispensables, utilisés quotidiennement mais de façon raisonnée. Ils ont largement prouvé leur utilité pour les élèves à besoins particuliers, notamment ceux en situation de handicap. Tous les professeurs spécialisés vous le confirmeront. Pour résumer, le personal computer est entré dans les écoles et dans les classes sans que plus personne (ou presque) ne trouve quoi que ce soit à redire. C'est aujourd'hui on ne peut plus naturel.

 

  A partir du début des années 2000, ce phénomène s'est amplifié suite aux progrès exponentiels du numérique et à la multiplication de nouveaux services et donc de nouveaux produits dérivés sur le marché. La première décennie du XXIème siècle allait être celle de la miniaturisation, des réseaux dématérialisés et enfin, du tactile. Trois révolutions en une. Et les établissements scolaires, bien sûr, n'allaient pas y couper, pour peu que l'on trouve un intérêt pédagogique à ces innovations. Il allait être vite trouvé, mais quid de l'intérêt pour l'élève cette fois-ci ? C'est une autre histoire...

 

  Toujours est-il que se sont multipliées dans les classes les présences encombrantes ou invisibles d'ordinateurs portables, de bornes wifi, de tableaux numériques interactifs, d'applications maintenant dématérialisées pour la plupart, etc, etc.

 

 

 

 

  Ce qui vient à l'esprit en premier, c'est la consommation d'énergie de ces machines qui pour l'occasion, le sont, énergivores. Pour une génération (la mienne) élevée à base de : "il faut éteindre la lumière quand on quitte la classe ou une pièce quelconque afin de ne pas gaspiller inutilement la précieuse énergie de notre planète", c'est un choc. Deuxième constat, l'aspect sanitaire : toutes ces ondes qui traversent les corps, euh, vous êtes sûrs que c'est bon pour la santé ? On sait que les ondes des téléphones sont certainement nocives, mais qu'en est-il de celles du WIFI ? La question commence à être débattue au sein même du ministère de l'Education Nationale et il semble qu'enfin, on commence à appliquer le principe de précaution en rééquipant les classes avec de bons vieux systèmes filaires et en ne réservant le WIFI qu'à certaines salles confinées. Si ce n'est pas la preuve qu'effectivement il y a un risque, je n'y comprends plus rien... Le troisième problème, c'est l'écran en lui-même. Idem, il m'a toujours semblé que passer plusieurs heures d'affilée devant un écran n'était pas en soit hyper bénéfique pour la santé... On a même parlé de crises d'épilepsie, non ? Sans aller aussi loin, il y a un risque de fatigue visuelle et nerveuse, réversible sur le court terme, un peu moins sur le long. Enfin, dernier inconvénient, et pas des moindres, l'équipement en "machines" et dérivés a évidemment un coût non négligeable, surtout en cette période de manque de crédits.

 

  Bien sûr, il y a aussi une tonne d'avantages, heureusement. Le fait d'être connecté, déjà, permet d'accéder au réseau rapidement, et donc, à tout un tas de sources d'informations. Attention quand même à en faire une bonne utilisation, tout le monde connait les dangers de la toile, mais heureusement, "médor" veille ("médor" est un procédé de sécurisation de l'accès au web pour les élèves). Les tableaux interactifs, sans être foncièrement indispensables, permettent, quand les personnels sont correctement formés et qu'ils utilisent le matériel convenablement (ce qui n'est pas toujours le cas) une approche innovante de la transmission du savoir, dans laquelle les élèves jouent un rôle actif. Cela leur permet de construire eux-mêmes leurs  savoirs, de les structurer, de les organiser grâce à des outils innovants, ludiques et attirants. C'est encore plus intéressant quand le tableau interactif est relié aux ordinateurs portables que chaque élève, ou chaque groupe d'élèves détient. Pour le professeur, il est possible d'effectuer un rétrocontrôle et de vérifier que chaque "groupe" effectue ou a effectué le travail. Pour les élèves, c'est l'assurance de ne pas être perdu, d'avancer à son rythme, et de profiter le cas échéant de l'expertise du professeur à bon escient. Enfin, il faut avouer que d'immenses progrès ont été fait dans le développement des outils (logiciels...) qui sont maintenant bien plus adaptés à la spécificité du support informatique et ne sont plus que des palliatifs numériques quand seul l'écran changeait du cahier. Ils ont maintenant véritablement interactifs et apportent une valeur ajoutée. Reste à en équiper maintenant les écoles qui "vivent" encore avec les anciennes et obsolètes versions...

 

  Je pourrais détailler les avantages et les inconvénients pendant des pages et des pages sans pouvoir au final émettre un avis tranché sur la pertinence de la présence de tous ces outils. Les plus réactionnaires argumenteront qu'avant on faisait sans, et que tout se passait pour le mieux. C'est vrai. Les plus friands de technologie diront eux que ces outils sont une chance inestimable, qu'il serait dommage de passer à côté, qu'il faut vivre avec son temps et qu'on ne peut priver les élèves de cet apprentissage de l'utilisation d'outils qu'ils seront amenés à utiliser dans leur vie privée et professionnelle future... Difficile également de ne pas leur donner raison. Pour ma part, je pense qu'une utilisation ciblée et raisonnée des ces nouveaux outils permet un travail efficace et complémentaire avec un enseignement plus "traditionnel" indispensable. Ils peuvent même parfois permettre à des élèves en difficulté de progresser plus rapidement...

 

  Reste maintenant à évoquer le sujet du jour, et la grande nouveauté de cette année scolaire : l'utilisation des tablettes numériques dans les classes.

 

 

 

 

  Quelques académies se sont jetées à l'eau et ont tenté des expérimentations dans certains établissements. La plus médiatisée a été celle de Limoges bien sûr, avec les équipements en Corrèze, département de notre nouveau Président de la République. On pourra citer également les académies de Grenoble, Créteil et Nice pour les plus actives. D'ailleurs, vous pourrez retrouver sur le site ecritech 3 (pour "écriture et technologies ") un éventail des possibilités et des expérimentations en cours via un large tour d'horizon du colloque qui a eu lieu à Nice en début d'année à ce sujet. Un reportage intéressant de quatre situations dans l'académie de Nice (vidéo visionnable sur cette page) vient illustrer le propos et le vaste éventail des possibilités avec des cas pratiques dans des écoles (audiovisuel), des collèges et des établissement spécialisés (élèves à mobilité réduite, malvoyants...)

 

  Parlons donc de la tablette numérique en elle-même : elle se présente sous la forme d'une ardoise, qui en plus d'être tactile, regroupe toutes les fonctionnalités d'un ordinateur (écran, clavier, calculatrice, réseau, logiciels...) dans un outil petit et maniable. Des détails sur la page wiki dédiée...

 

  Voici également un exemple (parmi d'autres) d'utilisation des tablettes dans une classe de primaire : 

 

 

  Son premier avantage est donc sa taille, et par extension, son ergonomie tactile. On peut de fait imaginer, dans le futur, que le poids du cartable soit considérablement réduit puisqu'à elle seule, elle pourrait contenir tous les manuels et cahiers de l'élève. A condition bien sur qu'elle ne s'ajoute pas à ces derniers, ce qui ferait d'elle un surpoids non négligeable. Deuxième avantage, sa rapidité de mise en marche, bien supérieure à celle d'un ordinateur classique. Ensuite, elle permet une connexion aisée et rapide à internet. Les chercheurs en pédagogie imaginent déjà ce cartable numérique de l'élève qui pourrait également devenir le bureau numérique du professeur, lui facilitant ainsi considérablement la tâche. Avec une contribution généralisée, les ressources pédagogiques pourraient être accessibles directement en ligne, à condition que se mette en place un développement intelligent d'applications adaptées aux nécessités pédagogiques. L'Education Nationale s'interroge d'ailleurs activement sur l'intérêt de ces outils. Son objectif avoué est la diffusion des usages numériques. Les tablettes permettraient d'aller encore plus loin que ce qui se fait déjà. On parle notamment de nouvelles ressources, d'accessibilité à ces dernières, de nouvelles méthodes, de modification des contenus, d'apprentissage de la programmation, de contribution à l'autonomie des élèves doublée d'un traçage de ces derniers, d'un futur paysage numérique, d'un mouvement vers la simplicité, de la généralisation d'un équipement individuel, de nouveaux repères, de nouvelles frontières, d'une réponse concrète à l'individualisation des parcours, d'une certaine forme de mutualisation des bonnes pratiques, de protocoles d'expérimentation... La conclusion qui émane de tout ce travail serait au final un gain d'efficacité en acte pédagogique avec pour incidence un travail de préparation un peu plus long pour les professeurs.

 

 

 

  Bien sûr tout n'est pas si idyllique, vous l'aurez compris. Un certain nombre de problèmes subsistent et des tas de nouvelles questions émergent et se posent : les tablettes ne règleront sans doute pas le problème de fond de l'Education Nationale qui n'arrive plus à jouer son rôle, qui est, je le rappelle, d'instruire TOUS les élèves, et ce quelle que soit leur origine (sociale, culturelle, géographique...). Le risque principal est une disparité dans les équipements en fonction du bon vouloir des collectivités territoriales (communes, départements, régions) qui sont au final celles qui vont permettre (ou non) l'équipement. On peut imaginer également des clivages rural/urbain, centre-ville et périphérie... Car comme je l'ai déjà dit, équiper tous les établissements en tablettes aura un coût et sera le cas échéant une manne supplémentaire pour les sociétés privées qui commercialisent ces produits et qui au final, seront certainement les premières bénéficiaires de cette "vague de numérisation", au détriment des principaux concernés, à savoir les élèves : en effet, les crédits utilisés pour ces équipements ne le seront pas dans d'autres domaines, par exemple l'entretien des locaux, l'équipement nécessaire dans d'autres domaines (sport, manuels, fournitures...), le recrutement et la formation des personnels (professeurs, aides maternelles, assistants d'éducation et pédagogiques, emplois de vie scolaire...). Enfin, permettront-elles réellement une plus grande efficacité de l'acte d'enseignement et par extension une baisse significative des statistiques effrayantes de l'échec scolaire ? Pas sûr qu'elles le puissent à elles seules. Elles peuvent toutefois permettre d'y contribuer.

 

  Dans l'idéal, les tablettes sont donc des outils très intéressants, pertinents la plupart du temps, mais faut-il y voir une priorité, comme semblent l'imaginer à court terme les grands penseurs de l'éducation ? Je n'en suis pas vraiment convaincu. Les priorités sont autres, dans l'immédiat, il me semble, même si c'est toute la société et pas seulement l'Education Nationale qui est concernée. L'enjeu englobe la responsabilité de tous, de l'Etat jusqu'aux parents, en passant par les personnels en charge des élèves et bien sûr les élèves eux-mêmes. L'enjeu est de taille. Avec ou sans les tablettes. Dans un monde idéal peut-être... On en est loin...

 

  Et vous, quel est votre avis ?

 

 

 



18/06/2012
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