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La dépénalisation en débat

 

 

  Depuis quelques jours, le sujet fait débat. Preuve de l'ampleur qu'il a pris : François Hollande, le Président de la République himself a reçu Cécile Duflot aujourd'hui, à ce sujet, et à l'Elysée s'il vous plaît. Bon, officiellement, il n'était question que de G20, mais officieusement...

 

 Même si le Président a fait savoir dans la foulée qu'il ne changerait pas sa position, le débat est tout de même lancé... Enfin, devrait-on dire. En effet, les lois encore en vigueur, ultra-répressives, datent de 1961, sans distinction aucune entre les différentes drogues (sauf pour l'alcool, bien entendu). Cette convention unique (qui a évolué depuis dans la plupart des 163 pays signataires, mais pas en France -sic-) stipule qu'en théorie, une personne possédant du cannabis risque jusqu'à la perpétuité. Un peu flippant, non ? Bon, évidemment, aucun juge n'est allé jusque là, mais cette loi est à l'origine de bon nombre de peines un peu disproportionnées, surtout pour les récidivistes et et il n'est pas rare de voir de simples consommateurs subir des peines de prisons ferme.

 

  Certains diront : quoi de plus normal ? Les drogués en taule, c'est la moindre des choses. Oui mais quand même, passer un certain temps derrière des barreaux pour avoir fumé un joint, c'est un peu cher payé, non ?

 

 

  Pour s'en convaincre, il suffit d'analyser rien qu'en surface la plupart des rapports toxicologiques sérieux, les mêmes que ceux qui ont vu naître le concept de drogues douces et de drogues dures. D'autres diront qu'il n'y pas de drogue douce... Soit, mais alors, que penser de l'alcool, qui dans quasi tous les rapports apparaît comme une drogue aussi dangereuse et nocive que l'héroïne, et dont on peut mourir du sevrage (ce qui, soit dit en passant, n'est pas le cas du cannabis) ?

 

  Cette simple constatation met en lumière toute l'hypocrisie bien française qui consiste à diaboliser une drogue (car c'en est bien une, hein, attention, il ne faut pas se leurrer) répandue dans la majeure partie des foyers français, tout en en glorifiant une autre au moins aussi dangereuse sinon plus du fait, un de sa toxicité avérée, deux de sa présence en vente libre à peu près partout. Avouez qu'il y a une certaine forme de contradiction honteuse et donc, de fait, inavouable.

 

  Voilà pour la partie émergée de l'iceberg. Reste la partie immergée... Et là, c'est encore plus moche : produits coupés et d'autant plus dangereux, économie parallèle, criminalité, banditisme organisé, enjeux financiers énormes, prise de risques, goût du risque, manque à gagner pour l'état... Juste un exemple simple et représentatif : il est quasiment plus simple et moins cher aujourd'hui de se procurer un gramme de cocaïne qu'une barrette de shit, pour des effets que l'on sait bien plus dévastateurs à court, moyen et long terme.

 

 

  Cette réponse ultra-répressive est-elle celle qu'on est en droit d'attendre d'un état censé être protecteur ? D'autant que ce dernier, quand il s'apercevra de la manne financière qui lui passe sous le nez, aura peut-être des regrets... qu'en pensera-t-il alors? (ce qui est étonnant, c'est qu'il ne l'ai pas fait avant...) ? Ou plutôt qu'en pense-t-il déjà ? Un exemple : à Oakland, dans la banlieue de San Francisco, la mairie a renfloué son budget grâce à une approche toute particulière de la vente "thérapeutique" de la marijuana. Elle a ouvert un certain nombre de "pharmacies" qui n'en ont que le nom, où les gens qui ont des ordonnances (obtenues très facilement pour une petite douleur feinte au dos par exemple) peuvent venir acheter tranquillement leur herbe, en choisissant la variété, et ce en toute impunité. Cette vente représente plusieurs millions de dollars et quelques pour cent du budget de la ville. Impressionnant, n'est-il pas ? N'y a-t-il pas là une idée pour désendetter nos belles communes ? Je plaisante évidemment... Quoique ?!

 

  Car oui, le cannabis a aussi des vertus thérapeutiques. Il est utilisé notamment pour traiter la douleur, de par les vertus analgésiques et sédatives du tetrahydrocannabinol, son principe actif. Il est également un anti-vomitif pour les sidaïques et pour les personnes en phase terminale auxquels il redonne également de l'appétit, permettant de fait de prolonger un peu leur vie. On peut également le prescrire afin de traiter certains glaucomes. Rien que ça. Bien sûr, on ne l'utilise pas (ou de façon très marginale) en France à ces fins du fait de son statut pénal.

 

 

  Bien évidemment, comme toute drogue, le cannabis présente une dangerosité de par une toxicité relative et des caractères nocifs. A forte dose, il peut créer une accoutumance, toutefois moindre que la nicotine de la cigarette. C'est également un psychotrope, c'est à dire qu'il altère certaines fonctions du système nerveux central et en particulier du cerveau, au même titre que l'alcool, mais de façon bien différente. Il ne rend par exemple pas violent, du moins jusqu'à preuve du contraire mais peut par contre avoir un effet "désociabilisant" chez certaines personnes qui ont des prédispositions. Ses effets varient en général d'un individu à l'autre, en fonction du milieu, de l'environnement, de l'état d'esprit au moment où il est ingéré...

 

  Il n'est donc a priori pas plus dangereux que l'alcool, voir moins, sauf, indirectement la plupart du temps, s'il est interdit comme c'est le cas en France. Il convient maintenant de se demander quelles sont les structures juridiques possibles pour une dépénalisation ou une légalisation, partielle ou totale, dans notre beau pays. D'abord, il y a la dépénalisation de fait qui permettrait un assouplissement de la répression envers les simples consommateurs. C'est la première étape, la plus évidente. Ensuite, son utilisation à des fins thérapeutiques, comme notamment dans certains états américains (la Californie, pionnière dans ce domaine). On pourrait également contrôler sa production, comme en Hollande, afin d'offrir un produit moins nocif pour le consommateur, puisque pas coupé, tout en contrôlant sa distribution (taxes, points de vente agréés...). Enfin, la légalisation pure et simple, qui semble impossible, permettrait à tout un chacun d'acheter et de consommer librement du cannabis, sans entrave.

 

 

  Nos fiers et traditionnels (ex-)dirigeants réactionnaires, Xavier Bertrand en tête, voient cette avancée sociale (?) à mon avis inéluctable d'un très mauvais œil, ce qui n'est pas étonnant. Traditionnellement, et au contraire du pinard, le cannabis n'aurait, selon eux, pas sa place historique en France... C'est bien mal connaître l'Histoire de notre pays... Il suffit de repenser à Baudelaire, Rimbaud et consorts qui étaient de fiers consommateurs de cannabis et qui, il me semble, ont marqué de leur géniale empreinte la Culture Nationale (avec un grand C). Cette même Culture qui fait notre fierté dans le monde entier...

 

 J'entends déjà les contradicteurs argumenter en stipulant qu'offrir sur un plateau aux jeunes le cannabis ne constituerait en rien une avancée significative, que cela ne ferait qu'augmenter la délinquance et la déliquescence de notre jeunesse déjà pas très reluisante etc, etc... Peut-être qu'ils ont raison, mais je leur rétorque une seule chose : ça ne pourra pas être pire que ça l'est déjà aujourd'hui. En effet, plus d'un jeune sur deux a déjà consommé du cannabis et plus d'un quart en consomme régulièrement, sans pouvoir présager de la réalité de ces chiffres... A mon avis, c'est bien plus... Donc... Qui ne tente rien n'a rien. Essayons, nous verrons bien.

 

  A bon entendeur, salut !

 

  Et surtout, bon apéro...

 

 

 



07/06/2012
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