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Panem Et Circenses (Du pain et des jeux)

 

 

 Les temps changent, assurément. Impossible de comparer notre humble société hyper-évoluée avec celles, lointaines et arriérées de l'Antiquité. La civilisation l'a emporté définitivement au XXIème siècle et tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. En plus, pendant quinze jours, ce sont les Jeux Olympiques. Que demande le peuple ?

 

  Le monde s'arrête de tourner au moment exact où la flamme pénètre dans l'arène. Les respirations, brusquement, sont retenues. Ça y est, c'est l'heure, l'évènement que tout le monde attend depuis de longues années. Tout a été parfaitement préparé, au millimètre, à la seconde près. Des centaines de milliers, des millions, des milliards d'yeux regardent tous dans la même direction, vers le point de convergence.

 

   Rien ne pourra plus les en détourner. 

 

   Le souverain donne le signal. Nous y sommes. Le sort est jeté.

 

  Dorénavant, seuls les vainqueurs seront portés aux nues. Les perdants subiront l'ultime châtiment et la honte éternelle s'abattra sur eux et sur leurs proches.

 

  Les muscles se tendent jusqu'au maximum, au bord de la rupture. L'adrénaline se déverse en flots constants comme autant de tsunamis qui feront sauter les barrages de la peur et repousseront les limites de la chair au-delà de ce qui est concevable. Le spectateur est là, hypnotisé. Lui aussi est nerveux. L'honneur de sa chapelle, de sa cité, de sa nation est en jeu. Tous les autres ne sont que des adversaires qui ne méritent pas la moindre once de respect et qu'il convient d'éliminer.

 

  Sans la moindre pitié.

 

  C'est parti. L'instant est crucial. Les cœurs s'emballent, les esprits chavirent dans l'euphorie, la tension, la haine.

 

  Vaincre ou mourir. Il n'y a pas d'alternative.

 

  D'un coup, d'un seul, tous les problèmes sont évacués, mis de côté. Les individus oublient leurs difficultés, la société ses divergences. Une nouvelle solidarité patriotique se construit, s'installe, transitoire, éphémère, fragile. Tous sous une même bannière, une même couleur. 

 

  Il faut vaincre, peu importe le prix, les cris, les pleurs, la douleur, le sang.

 

  Car seule compte la victoire du peuple, de la nation, de l'ethnie, de la race. Nous sommes les plus forts. Les autres ne sont rien. 

 

  Bientôt, pourtant, il sera temps d'en finir, terminé, éteindre la flamme, porter aux nues les vainqueurs et ramasser les corps sans vie ou sans âme des ignobles perdants.

 

  Alors, nous quitterons l'arène, rassasiés, ivres de pain et de jeux, emplis de légendes qui resteront à écrire et prêts à retourner à nos quotidiens laborieux afin d'attendre les prochains jeux du cirque.

  

  Sans pain gratuit.

 

  Le monde pourra alors tourner à nouveau et la vie reprendre son cours normal.

 


 

  Panem et Circenses

 

Du pain et des jeux
et le peuple sera content,
il suivra aveuglément
les lois des seigneurs dieux.

 Le peuple est-il content ?
Assurément,
il ne montre pas ses dents,
il aurait honte,
elles sont pourries.

Du pain il en a partout,
sous toutes ses formes,
pour tous les goûts.

Souvent même, il n’est plus à ses goûts
et il faut en faire des cendres
qui rempliront les déserts
au lieu de les nourrir.

 

 

Juvénal - Poète Romain

Autour de l'an 100.

 

 

 



10/08/2012
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